Pierre Sens et la mobilité cellulaire à l’épreuve des systèmes biologiques complexes
L’origine du projet selon Pierre Sens ? « Une rencontre en 2010 avec un biologiste allemand nommé Michael Sixt. Je l’ai écouté évoquer la mobilité cellulaire envisagée dans une matrice synthétique c’est-à-dire un environnement contrôlable. Contrairement à plusieurs de ses confrères, il s’intéressait à des paramètres physiques comme la friction, l’élasticité… Des paramètres connus des physiciens et j’ai compris qu’une discussion entre lui et moi était possible.
Ce n’est que plus tard que nous avons eu simultanément l’idée de ce projet. Entre temps, il en avait parlé à l’un de ses collègues biologistes spécialistes de l’ in vivo et j’avais quant à moi contacté un confrère physicien expérimentateur. »
Pierre Sens a ainsi constitué un groupe international et pluridisciplinaire composé de deux biologistes et deux physiciens aux approches très complémentaires.
La clé du succès : l’envie de se parler
« Une telle collaboration, entre spécialistes de disciplines différentes, n’est pas évidente » explique Pierre Sens. « Le plus important selon moi ? Avoir l’envie de se parler, savoir que chacun est assez ouvert pour faire l’effort de comprendre et se faire comprendre. Le biologiste In vivo travaille sur des embryons de poisson et se concentre sur la mobilité de cellules de reproduction. Même si nous, physiciens, avons beaucoup appris en biologie depuis le début du projet, il y a un certain nombre de paramètres qui nous échappent encore. Le dialogue facilite les choses et nous avançons. »
Pierre Sens, français, travaillant à Paris (physicien théoricien),
Michael Sixt, allemand, travaillant à Vienne (biologiste spécialiste In vitro),
Erez Raz, israélien, travaillant à Munster (biologiste spécialiste In vivo),
Helim Aranda Espinoza, mexicain, menant des recherches aux USA (physicien expérimentateur).
Des déplacements inexpliqués
Il faut savoir que les cellules se déplacent de différentes façons, selon leur type et l’environnement dans lequel elles évoluent. Curieusement, quand on place une cellule à plat sur un support en deux dimensions, une face avant et une face arrière apparaissent. La cellule adopte une direction et commence à se mouvoir. D’autres cellules, observées dans un environnement tridimensionnel, adoptent d’autres modes de mobilité.
– 1996 : soutient sa thèse à l’université de Strasbourg
– 1996-1998 : Post-Doctorats (aux USA et en Israël)
– 1998 : nommé chargé de recherche au CNRS (Strasbourg)
– 2005 : rejoint l’Unité mixte de recherche Gulliver dans l’équipe de Physico-chimie théorique à l’ESPCI ParisTech
– 2011 : nommé directeur de recherche au CNRS
Comment ? Pourquoi ? « Nous ne le savons pas. Il y a sûrement un couplage entre propriétés physiques et décision biologique. Nous aimerions mettre cela en évidence, trouver l’ et répondre à la question suivante : comment une cellule fait-elle pour choisir son type de mobilité ? Nous pouvons apporter un éclairage de physicien en nous fondant sur un modèle que les biologistes peuvent décrire. »
Quel est l’objectif des travaux financés par l’HFSP ?
« Je souhaite réaliser une description quantitative fondée sur des équations, une sorte de « » pour la mobilité cellulaire, qui mettra l’accent sur l’importance de paramètres physiques sur la mobilité des cellules. Enfin, et c’est aussi une motivation, ces travaux peuvent nous aider à comprendre comment se déplacent les cellules cancéreuses et peut-être à contribuer à lutter contre ces maladies. »
A lire page suivante : un laboratoire où les interactions entre théoriciens et expérimentateurs sont propices aux découvertes.